Le syndrome de Münchausen : maltraitance sur ordonnance

Je ne compte plus le nombre de parents qui m’écrivent pour me faire part de leurs problèmes suite à une séparation ou un divorce. Les associations sos-parents-japan.org et sos-papa, en collaboration étroite avec le réseau associatif Oyakonet (18 associations japonaises!) font un excellent travail de lobbying pour essayer de faire changer la loi sur l’autorité parentale au Japon.
En effet, la loi au Japon ne reconnaît l’exercice de cette autorité qu’à un seul parent, ce qui conduit fréquemment à des abus de la part du parent auquel elle a été attribuée, avec pour corollaire l’impossibilité pour l’autre parent de continuer à voir régulièrement son enfant.
Notez bien, j’écris « parent » mais il s’agit à 90% des pères qui sont privés de droit de visite à leur enfant suite à un divorce. Et ceci ne touche pas les étrangers mais la très grande majorité des divorcés japonais.
Il convient d’insister sur le fait que LES ENFANTS sont ainsi privés de leurs droits élémentaires de voir leurs 2 parents, et, dans le cas d’un parent étranger, sont également privés d’un pan entier de leur famille de « l’autre pays » ainsi que de sa langue et sa culture.

Oui, cela paraît inconvevable pour un Français mais c’est ainsi que ça se passe au Japon en 2009!

Un des aspects de ce problème me semble être ce que l’on appelle « Le syndrome de Münchausen ». Il a été décrit par les médias (y compris les médias japonais, il y a déjà quelques années) mais la compréhension de son mécanisme n’est sans doute pas entrée dans les esprits. Il touche en effet à des tabous, notamment celui de l’amour maternel, qui le rendent difficile à déceler, y compris pour le corps médical.
Wikipédia présente un article très incomplet, et donc décevant, sur le sujet mais en revanche doctissimo.fr  présente plusieurs pages permettant de bien appréhender le problème.

Extrait de l’article de Mathieu Ozanam :
(article complet ICI)

Une maladie insoupçonnable

Si l’on estime que le phénomène est marginal, son ampleur réelle demeure très difficile à évaluer. Plusieurs raisons peuvent l’expliquer, et au premier chef le désarroi des médecins face à une maladie qui échappe à tous les traitements. La plupart des mères évoluent en effet dans le milieu médical ou paramédical. Les signes qui permettraient de repérer la simulation ne sont pas perçus : le fait que l’enfant se rétablisse en l’absence de ses parents ; la multiplicité de cas de maladies rares dans une même fratrie… Et quand bien même des soupçons pourraient naître, les médecins impuissants n’osent pas briser le tabou de l’Amour maternel. Impossible d’accabler cette mère éplorée qui semble si dévouée à son enfant et si coopérante avec l’équipe médicale. Il faut ajouter que la législation française interdit de pratiquer une vidéo-surveillance à l’insu des personnes filmées. Les mères doivent par conséquent être prises en flagrant délit « d’empoisonnement ».

Coupable ou victime ?

Pour autant les psychiatres voient dans la mère plus une victime qu’une coupable. Son amour est fusionnel, son enfant est considéré comme étant le prolongement d’elle-même. Ces femmes ne cherchent pas à maltraiter leur enfant, mais à attirer l’attention de l’équipe médicale pour forcer l’admiration de leur entourage par leur abnégation. Incapable de tisser des liens par ailleurs, la pseudo-maladie leur permet de développer une sociabilité qui leur fait défaut. Cette position est valorisante à plus d’un titre, puisque la mère se sent supérieure aux médecins. « Non seulement elles maîtrisent la pathologie et le pronostic de l’affection, mais en plus elles peuvent « guérir » leur enfant du jour au lendemain » explique le Dr Andrei Szoke, attaché du service de psychiatrie de l’hôpital Albert Chenevier (Créteil).

Des malades qui refusent de se soigner

Les personnes atteintes du syndrome de Münchausen refusent dans la plupart des cas le diagnostic et ne se reconnaissent pas comme étant malades. « Elles savent que ce qu’elles font n’est moralement pas acceptable, mais comme dans la kleptomanie ou la pyromanie, elles vivent un état tensionnel qui ne s’apaise qu’une fois l’acte accompli ». Internet offre un nouveau moyen d’expression à ces malades qui participent à des forums sur des sites médicaux ou associatifs. « En général ils se font repérer par leur assiduité, les multiples complications qu’ils décrivent laissant peu d’espoir sur leur pronostic vital dans la vraie vie » précise Andrei Szoke. Quant aux enfants, on a constaté que nombre d’entre eux développaient à leur tour un syndrome de Münchausen une fois adulte, et parfois même dès l’adolescence.

Publié par

Christian Bouthier

Christian Bouthier, un Français au Japon depuis 1982. フランス語講師 | 和仏翻訳・通訳 | traduction et interprétariat japonais-français.

5 réflexions au sujet de « Le syndrome de Münchausen : maltraitance sur ordonnance »

  1. Bonjour,

    Lorsqu’on a affaire à des personnes souffrant de problèmes psychologiques, oui, le scandale est de ne pas protéger ces enfants. Il faut d’abord dépister la maladie mentale, l’identifier clairement et ensuite prendre des mesures.

  2. Je ne connaissais pas ce terme. Pourtant j’ai lu des romans (en anglais) où ce fait étant présent dans l’intrigue, voire l’essentiel de l’intrigue; je connaissais donc le phénomène mais en ignorais le nom.

    Oui, l’attitude japonaise où le parent qui s’empare de l’enfant coupe pour son enfant absolument tout lien avec l’autre parent me scandalise, me révolte, je n’arrive pas à m’y faire. Mêmes enfants qu’on voit plus tard faire appel à une émission de télé ou à une une agence spécialisée pour essayer de retrouver le pan de famille perdu (il y a éventuellement aussi de frère et sœurs perdus, quand il y a eu partage des enfants)…
    Ça me scandalise autant que le fait que nous épouses non-japonaises avons une place très marginale dans le koseki. Quand j’ai encore vu ça à la mairie dans le koseki de mon mari après son décès (survenu le 20 juillet), j’ai explosé, de colère et de pleurs, honte à moi!!!

  3. Quand Münchausen ne me fait plus rire…
    Je suis médecin homéopathe généraliste depuis plus de vingt ans en cabinet privé, en Europe et en Inde. Ce qui est dit dans votre article sur le syndrome de Münchausen reflète très précisément ce que je vois comme praticien depuis des années. Ce syndrome touche toutes les couches sociales, tous les âges, les deux sexes dans tous les pays. Comme toujours les fondements de ce syndrome sont multiples et divers et comme l’aurait souligné le regretté Marcel Sandrail, il obéit à des données anthropologiques liées à une époque particulière. On peut en citer prudemment quelques unes sans trop risquer de se tromper :
    – Isolement de l’individu de plus en plus chronique et silencieux dans une société qui se veut pourtant multiple, accessible et revendiquant l’échange (internet) de tous, partout et à tout moment – L’excès d’information en l’absence de guide devient une censure plus efficace encore que celle des temps passés où la censure existait par manque endémique d’information (cloîtrée dans les monastères) –
    – Difficulté pour l’individu de trouver un sens, de donner du sens à sa vie et je dirais même que la société lui impose dans trouver un et de l’affirmer. Recherche plus ou moins consciente de formater sa vie à l’aide d’archétypes, ceux du héros comme aventurier, mystique, être utile, sacerdoce, et docteur sauveurs de tous les maux…
    – Incertitude de l’emploie et anxiété par anticipation chronique
    – Éclatement de la famille et de ses références
    – Sédentarisation excessive
    – Mécanisation, informatisation et robotisation de tous les paramètres de la société avec l’anonymat et l’irresponsabilité sous jacent élevés au point d’absence de repères.
    – Cet anonymat abyssal engendre chez les individus le besoin incontournable de paraître et d’être reconnu à tout prix, peut importe l’artifice, le mensonge, la mythomanie et le prix à payer.
    – Etat paranoïaque de doute et de déception face aux promesses d’espoir trahies de la science et de la raison, face aux religions et à la mystique bafouées par tous les intégrismes.
    – Les pertes ou absences de la « conscience morale », du « bon sens », de la « notion de justice » qui permettent à l’être humain de se développer correctement, car il apparaît, comme le disait le psychiatre et neuro-psychiatre Henri Baruk «…que l’insatisfaction morale a des conséquences bien plus graves que la frustration des instincts ».
    J’interviens ici pour entrevoir dans ce syndrome des modalités particulières et pas évidentes à identifier, pourtant elles sont bien réelles et causes d’authentiques souffrances dans l’entourage. Elles sont toutes, à leur manière, propices à développer à plus ou moins long terme des attitudes caractéristiques d’un syndrome de Münchausen. J’aimerai aussi préciser que ce syndrome est loin d’être un archétype de la femme et si les enfants en souffrent les premiers ils n’en ont pas l’exclusivité, loin s’en faut. Et même si cela paraît saugrenu de les citer ici, les animaux sont eux aussi victimes de ces déviances humaines.
    Quelques exemples pour illustrer mes propos :
    – La femme ou l’homme, mère, père, sœur ou frère qui font vivre un authentique chantage à la maladie, un chantage affectif au sein de leur famille. De ces gens qui se plaignent depuis des années de tous les maux mais qui enterrent peu à peu toute la famille après les avoir vampirisé à l’extrême.
    – De ces gens attirés par les ONG intervenants dans les pays lointain (et pas prés de chez eux), n’imaginant leur vie que dans le service, celui-ci étant une drogue comme une autre. Ils rentreront de leur aventure exotique comme des héros et utiliseront les récits qu’ils en feront pour leurs bénéfices affectifs et égocentriques.
    – La même chose pour ces médecins, ces avocats, ces professeurs de l’éducation nationale, ces politiques plus carriéristes que motivés par l’utilité publique de leur profession.
    Dans un des commentaires du cite «… Quant aux enfants, on a constaté que nombre d’entre eux développaient à leur tour un syndrome de Münchausen une fois adulte, et parfois même dès l’adolescence. », malheureusement c’est on ne peut plus vrai et difficile à identifier, les profs ou les assistantes sociales n’étant pas préparés pour cela…
    Le plus curieux, le plus inquiétant est que les hommes et femmes qui dirigent nos destinés au niveau politique, économique ou éducationnel souffrent souvent de ce syndrome. Il suffit d’analyser les derniers scandales pour en prendre toute la mesure. Ces dernières années ont vu apparaître une augmentation inquiétante de ce phénomène au point que je serais amené à considérer ce syndrome comme une authentique « pandémie » de ce début de millénaire…
    Dr. Patrick’s O’nolan

  4. A vrai dire c’est une question difficile, parce qu’il y a des enfants etc. Mais quand meme il faut decider que faire et comment agir. Bon chance a tous le monde!

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